La propagande de guerre est-elle encore possible en France 2024 ?
"La propagande est aux démocraties ce que la violence est aux dictatures"
Auteur Jans TOLHOWIGH
Tous niveaux
Qu’il s’agisse de situations de guerre froide, tiède ou chaude, le recours à la propagande de guerre est une phase nécessaire pour qu’un gouvernement ou que des acteurs militaires puissent faire envisager l’inenvisageable aux opinions publiques. La propagande de guerre est un outil intéressant dans la perspective qu’il pousse des masses entières de population à se soumettre à l’injustifiable nonobstant les nombreuses conséquences, désolations et tourments qu’elles devront supporter, et ce, en toute inutilité.
En effet, une guerre laisse toujours place à une situation d’apaisement accompagnée des sempiternels remords du « tout ça pour ça ! » et « Plus jamais ça ! ».
Pour autant, avant ce cruel appel à la raison, l’histoire nous conte qu’à chaque épisode d’avant-guerre, le ventre mou des populations se laisse berner par les mêmes paroles empoisonnées de ces individus « va t-en guerre » au profil ostensiblement déviant. Ceux-là mêmes, prêchant, à qui veut l’entendre, les romantiques vertues du courage et du sacrifice (des autres) et qui, par ailleurs, ne seront jamais exposés à la moindre ligne de front où règne la loi du métal en fusion déchiquetant des corps crasseux et fracassant les âmes de ce qui fut, il y a peu encore, les enfants chéris de parents aimants.
Alors sur quels stratagèmes sémantiques, ces grands promoteurs du sacrifice s’appuient-ils pour obtenir l’adhésion majoritaire d’un peuple sédaté et comme sous transe hypnotique ? Pour répondre à cette question, je vous proposerai 15 règles fondamentales que l’on retrouve pour mener une propagande de guerre efficace et qui sont utilisées unanimement par les vrp du camp du bien au travers de tous les conflits de l’histoire.
Et si nous étions aujourd’hui confronté à la propagande de guerre ?
Que ferions-nous ? Qui serions-nous ?
A chaque soubresauts de l'Histoire, un jeu de dupe se joue à grand jour : celui de la propagande de guerre. Comme une partition déjà jouée par avance, elle s’emploie avec férocité à influencer les masses, à semer la discorde et à modeler les pensées selon les desiderata d’une classe dirigeante n’ayant de cesse que d’encourager l’esprit belliqueux.
On notera qu’initialement la propagande de guerre est initialement davantage destinée aux citoyens du pays ennemi. Avec cette stratégie de persuasion psychologique, les représentants et leur nation se dressent en remparts impénétrables, murées dans leur détermination belliqueuse de positions « jusqu’au boutistes ».
Si c'est pour la Patrie alors là...
«Quand vos combattants, qui doutent dans leurs consciences obscures de la bonté de leur cause, sentiront fléchir leur courage à l’idée de mourir pour l’accomplissement de desseins qu’on n’ose formuler, le drapeau tremblera dans leurs mains, tandis que le nôtre dominera la bataille, appelant tous les cœurs au sublime sacrifice pour l’âme et le corps de la Patrie»
« Les deux drapeaux », L’Homme libre, 6 août 1914 Georges Clémenceau
Pour autant la propagande de guerre peut s’adresser à ses propres concitoyens. Ce fût le cas en 1917, lorsque le président Wilson dû convaincre sa population, très ostile d'entrer dans la guerre, d’envoyer ses enfants sur dans les charniers du front d’un pays étranger et que celle-ci dû s’accommoder d’une pauvreté engendrée par la mise en place d’une économie de guerre par laquelle l’État s’arroge, de facto, des pouvoirs quasi-illimités sur sa population. N’ayons pas peur des mots mais une économie de guerre signifie révoquer totalement le droit naturel individuel pour le substituer à un droit positif totalitaire et inattaquable en s’affichant comme étendard du camp du bien.
Au regard de l’actualité, nous observons encore une fois les secousses de l’instabilité internationale. Et dans cette prévisible valse des consciences, la propagande de guerre se déploie déjà sur le pays de Lumières, oblitérant peu à peu l'histoire diplomatique représentative de notre beau pays mais aussi la paix devenue si habituelle, trop peut être, et coulant depuis des décennies dans le tissu social considérée comme acquise. Une propagande de guerre modelant les perceptions, façonnant les destins. Une propagande de guerre poussée par les mêmes qui agitent le gonfalon de la démocratie qu’ils n’ont pas hésité à piétiner lors du référendum de 2005. C’est cocasse pour ne pas dire répugnant ! L’ironie du sort n’en finissant plus !
Une erreur serait de croire qu’avec notre monde moderne nous ne tomberions pas face aux mêmes sornettes qui fissent jadis courir à leur trépas des combattants confiants d'une victoire facile. En effet, l’actualité nous prouve chaque jour la portée toute relative, et c’est un euphémisme, du « plus jamais ça ». Par cet exemple de rhétorique à la petite semelle nous serions à même de nous interroger sur nos aptitudes intrinsèques à apprendre de nos erreurs collectives.
L’Homme, tel le châtiment de Sisyphe, n’apprendrait-il pas moins qu’il ne puisse s’empêcher de se répéter ?
La propagande de guerre : dire pour nuire
Propagande de guerre : un fléau historique
Depuis toujours, la guerre s'est accompagnée d'un autre combat, moins visible mais tout aussi crucial : celui de la manipulation de l'opinion publique. Gardons bien à l'esprit que la propagande de guerre est un levier incontournable au service du mensonge et de la haine qui vise à influencer les perceptions et les émotions pour soutenir l'effort de guerre et convaincre de mettre à genoux l'ennemi.
La propagande de guerre utilise à gré un style de communication qui va susciter des sentiments comme la peur, la colère et le patriotisme afin d'insufler chez le citoyen une double représentation ; celle d'une image favorable de son propre camp et celle d'une diabolisation, au sens premier du terme, de l'ennemi.
Faux récits, exagérations des forces et des succès, minimisation des pertes et des revers, diabolisation de l'ennemi : la propagande de guerre utilise tous les moyens pour influencer les esprits et obtenir l'adhésion. La désinformation devient alors un outil central, diffusée à travers de tous les médias possibles ; affiches, tracts, films, discours radiodiffusés et, aujourd'hui, les réseaux sociaux. L'étape finale étant d'obtenir l'adhésion majoritaire de la population à soutenir l'effort de guerre et à se sacrifier pour la cause nationale.
Les ingénieurs du chaos
«Ils influencent à notre insu nos comportements et nos attitudes. Depuis plus d’un siècle, ils fabriquent le consentement ou le dissentiment, font et défont les élections, persuadent des nations d’entrer en guerre, défendent les intérêts des industries polluantes ou promeuvent la consommation de masse. Qu’on les appelle spin doctors, « maîtres du faire croire », « ingénieurs du chaos », « persuadeurs clandestins » ou « ingénieurs de l’âme humaine », ils ont tous fait profession de nous manipuler pour servir des projets politiques, industriels ou commerciaux et façonnent ainsi le monde dans lequel nous vivons. Qu’ils soient publicitaires, communicants, propagandistes politiques, lobbyistes, scientifiques, cinéastes ou hommes de télévision, ils sont passés maîtres dans l’art de la persuasion, un art qu’ils ont sans cesse perfectionné en tirant profit des avancées des sciences et des techniques, jusqu’à mettre au point, à l’ère numérique, de véritables armes de manipulation de masse.»
«Les maîtres de la persuasion» David Colon
Comment identifier une propagande de guerre en 15 règles ?
La propagande de guerre est un ensemble de techniques visant à manipuler l'opinion publique pour servir un projet belliciste. Elle utilise divers moyens pour diffuser des messages biaisés et émotionnellement chargés afin de soutenir l'effort de guerre et dont voici une liste non exhaustive :
- Créer un narratif simple et puissant : « Nous sommes les gentils et là dehors guettent les méchants »
La propagande de guerre doit présenter un récit facilement compréhensible par le grand public, mettant en avant les objectifs de la guerre et les ennemis à combattre. - Diaboliser l'ennemi : « C’est l’ennemi le seul responsable de la guerre et c’est lui le méchant ».
Pour mobiliser l'opinion publique en faveur de la guerre, il est essentiel de dépeindre l'ennemi comme une menace existentielle, déshumanisant ainsi ses membres et justifiant toute action contre eux. - Utiliser des slogans et des symboles percutants : « Comme le dit jadis Julius Caesar... blablabla».
Des slogans simples et des symboles forts peuvent aider à galvaniser le soutien populaire à la guerre et à susciter un sentiment d'unité nationale. - Contrôler l'information : « L’ennemi provoque des atrocités alors que le camp du bien de dommages collatéraux involontaires »
La censure et la manipulation de l'information sont des outils essentiels pour contrôler le récit de la guerre et éviter la diffusion de messages contraires aux intérêts de la propagande. L’unité nationale passe ici principalement par la conformité des informations essaimées. L’’intérêt de cette tactique permet de cimenter une cohésion de positions préfabriquées s’établissant sur le prêt à penser préambule nécessaire au prêt à agir. - Exploiter les émotions : « Vous vous sacrifiez pour une noble et grande cause commune ! »
La peur, la colère et le patriotisme sont des émotions puissantes qui ne jamais oubliées pour influencer les opinions publiques et justifier la guerre. - Utiliser des témoignages et des anecdotes :
Les récits personnels de héros, de victimes et de témoins de l'horreur de la guerre peuvent être utilisés pour susciter l'empathie et rallier le soutien à la cause. - Contrôler le langage : « Ne pas faire la guerre, c’est léguer à nos enfants un monde de désolation ».
Utiliser un langage chargé émotionnellement et des euphémismes pour présenter les actions militaires de manière favorable et atténuer leur impact négatif sur l'opinion publique. - Mobiliser les médias et les leaders d'opinion : Les médias et les leaders d'opinion jouent un rôle crucial dans la diffusion de la propagande de guerre et dans la légitimation des actions militaires.
- Utiliser la répétition : « Il nous faut arrêter l’ennemi ! » « Nous n’avons plus le choix ! »
Répéter les messages clés de la propagande de guerre de manière constante et cohérente peut aider à renforcer leur impact et à façonner les perceptions publiques. - Présenter la guerre comme inévitable : « Nous ne voulons pas la guerre mais nous n’avons pas le choix ! Nous sommes le camp du bien ! »
En présentant la guerre comme une réponse nécessaire à une menace imminente, il est possible de légitimer les actions militaires et de minimiser les oppositions. - Cibler les populations civiles : « Chaque citoyen peut combattre à sa manière au travers de sa contribution et de sa servilité sans limite »
La propagande de guerre ne se limite pas aux soldats et aux gouvernements ; elle vise également à influencer les opinions et les comportements des populations civiles. - Créer un sentiment d'urgence : « Pour maximiser nos chances de victoire et minimiser les pertes, nous devons prendre l’initiative maintenant ».
En présentant la guerre comme une nécessité immédiate et vitale, il est possible de mobiliser rapidement le soutien populaire et de justifier des mesures extrêmes. - Nier ou minimiser les pertes civiles : « Nous ne subissons que peu de perte alors que l’ennemi paye un lourd tribu »
Minimiser les pertes civiles et présenter les actions militaires comme précises et chirurgicales peuvent contribuer à atténuer les critiques et à maintenir le soutien à la guerre. - Promettre une victoire rapide et décisive : « Nous mettrons l’ennemi à genoux rapidement grâce à une mobilisation rapide et fulgurante »
En présentant la guerre comme une entreprise rapide et victorieuse, il est possible de maintenir le soutien populaire même face à des difficultés et des revers. - Réprimer toute dissidence : « Douter de la propagande revient à de la traîtrise »
La propagande de guerre est souvent accompagnée de mesures répressives visant à étouffer toute opposition ou critique, garantissant ainsi un soutien unilatéral à la cause militaire.
Comment résister à la propagande de guerre en 15 principes ?
Dans les périodes de conflit, la propagande de guerre peut être un outil incontournable utilisé pour manipuler les opinions publiques et justifier les actions militaires. Cependant, il est possible de résister à ces tentatives de manipulation en adoptant une approche critique et réfléchie.
Voici 15 principes à suivre pour résister à la propagande de guerre.
Analyse critique et réflexion
- Exercer un esprit critique : Remettez en question les informations et les discours présentés par les médias et les gouvernements. Analysez les sources et recherchez des points de vue alternatifs.
- Faire preuve de scepticisme : Ne prenez pas les messages de propagande de guerre pour argent comptant. Méfiez-vous des affirmations non étayées et des déclarations sensationnalistes.
- Étudier l'histoire : Comprenez les schémas récurrents de la propagande de guerre en examinant les exemples du passé. Apprenez des erreurs et des succès des générations précédentes.
- Questionner les motivations : Interrogez-vous sur les motivations sous-jacentes derrière les messages de propagande. Qui bénéficie de la guerre et de sa justification ?
- Analyser les intérêts en jeu : Identifiez les intérêts politiques, économiques ou géopolitiques qui pourraient influencer la propagande de guerre.
Diversité des sources et des perspectives
- Diversifier les sources d'information : Consultez une variété de médias nationaux et internationaux pour obtenir une perspective plus large et équilibrée sur les événements.
- Privilégier les faits : Basez vos opinions sur des faits vérifiables plutôt que sur des opinions ou des spéculations non fondées.
- Soutenir le journalisme indépendant : Encouragez et soutenez les médias indépendants qui fournissent un journalisme rigoureux et objectif.
Dialogue et ouverture d’esprit
- Promouvoir le dialogue et la discussion : Échangez des points de vue avec d'autres personnes et encouragez le débat ouvert et respectueux sur les questions de guerre et de propagande.
- Remettre en question les stéréotypes : Ne vous laissez pas emporter par les stéréotypes et les généralisations simplistes sur les groupes ethniques, religieux ou nationaux.
- Respecter la diversité des opinions : Reconnaître que des opinions divergentes existent et écoutez-les avec ouverture d'esprit, même si elles vont à l'encontre de vos propres croyances.
- Se méfier des discours de haine : Rejetez les discours de haine et les appels à la violence qui peuvent être propagés dans le cadre de la guerre psychologique.
Empathie et engagement pour la paix
- Développer son esprit critique dès le plus jeune âge : Éduquez les jeunes générations à être critiques face aux messages médiatiques et à développer un esprit analytique.
- Favoriser l'empathie et la compassion : Cultivez l'empathie envers les personnes affectées par le conflit, qu'elles soient des soldats, des civils ou des réfugiés.
- Soutenir les initiatives de paix : Engagez-vous dans des actions et des initiatives qui favorisent la résolution pacifique des conflits et la promotion des droits de l'homme.
En suivant ces 15 principes, vous pouvez renforcer votre résilience face à la propagande de guerre et contribuer à créer un environnement où la vérité et la paix prévalent sur la manipulation et la violence.