Micro expression
"Le visage contient souvent deux messages : ce que le menteur veut montrer et ce qu'il cherche à dissimuler."
Auteur Jans TOLHOWIGH
Tous niveaux
"Il ne vous dira rien !"
Avec ces quelques mots l’avocat signifiait au consultant venu interroger son client qu’il n’obtiendrait aucune information sur la suspicion d’attentat qui pesait sur lui et avait conduit celui-ci à se faire arrêter par les autorités. Il fallait pourtant faire vite car des vies étaient en jeu et il n’y avait aucun doute sur l’implication du suspect dans ce qui allait sous peu se concrétiser par un massacre.
Nous étions bien en présence du poseur de bombe, mais où était-elle ?
Dans cette pièce aux murs blancs, la lumière vive des néons incrustés dans le plafond tombait sur les trois protagonistes et ne laissait aucune chance à quelques dissimulations corporelles que ce soit. Nous étions ici bien loin des ambiances feutrées des cabinets auxquels était habitué le psychologue appelé à prêter main forte à la police !
La balle était désormais son camp ! Là où les autorités spécialisées, et présentes derrière la vitre sans teint, n’avaient obtenu à leurs questions, des heures durant, comme unique réponse l’arrogance silencieuse du suspect, c’était maintenant à son tour de tenter de lui soutirer les précieuses informations.
Habillé de la tenue orange habituelle propre à certaines prisons américaines, le suspect était muré dans un silence provocateur et parfaitement assumé. Sur sa carrure imposante était placardée de nombreux tatouages arborant son appartenance à un gang bien connu et redouté des services de police. Assis et enchaîné à une chaise, ses mains étaient posées sereinement sur ses cuisses. Face à son interlocuteur bien plus chétif, il affichait, avec une légère désinvolture, une contenance hautaine et méprisante. Il n’était pas encore prêt à céder !
Le psychologue était attendu et observé car il avait la réputation de pouvoir détecter des choses que nul autre ne pouvait voir. Les agents présents dans la pièce attenante piétinaient d’impatience et fulminaient de voir de précieuses minutes s’envoler et les rapprochaient de ce qu’ils considéraient comme inéluctable.
Il avait bien entendu les derniers mots de l’avocat qui lui intimait le sentiment qu’il perdait son temps. Puis, il décida d’entrer dans la partie et, tout en fixant le suspect droit dans les yeux, asséna à tour :
- "Ca m’est égal ! De toute façon, j’évite d’écouter les mots qui sortent de la bouche de mes contemporains. Les études sont formelles, les gens mentent comme des arracheurs de dents au moins trois fois en dix minutes de conversation. Ca, c’est la moyenne ! Nous n’avons pas d’étude spécifique sur des gens qui font sauter des églises mais cela changerait sûrement la donne !"
"Si l’on en croit les autorités, vous voulez tuer un maximum de gens. La police a commencé à passer au peigne fin les plus grosses églises de la région. Mais à mon avis ils ont tout faux et j’ai une autre théorie !"
Avec sa tirade, le psychologue avait attiré l’attention de tous et voulait maintenant détecter certaines attitudes corporelles en réponse aux allégations qu’il s’apprêtait à égrainer une après l’autre. C’était bien là sa stratégie, cheminer pas à pas vers l’aveux irrépressible en diminuant progressivement la granularité des possibilités.
- "Vous avez choisi quelque chose de plus raisonnable. J’ai comme l’impression… que c’est plutôt… une petite église… dans l’un des quartiers proche."
Il n’avait pas cessé de scruter le moindre mouvement, la moindre attitude du suspect qui, dans ce qui pourrait s’apparenter à un reflex communicationnel, rompit le silence et lança :
- "Vous êtes à côté de la plaque !"
- "Ne répondez-pas", lança immédiatement l’avocat.
Pourtant, la réponse qu’attendait le psychologue avait bien été lâchée. Non pas ces quelques mots d’opposition mais ce petit geste furtif, presque imperceptible. Une légère élévation d’épaule unilatérale traduisant un manque de confiance dans ce qu’il venait de dire.
Ses mots disent une chose, son corps en dit une autre. C’est un menteur !
Il fallait maintenant aller plus loin, réduire le champ des possibilités.
- "Ca vaudrait peut être le coup de fouiller l’église de South Bridge ?"
A ces quelques mots, le visage du suspect fit davantage face, impassible mis à part un rapide et léger rictus qui ne dura qu’une fraction de seconde. Pour le psychologue, cette information signifie que le suspect cache sa joie lorsqu’il entend sa proposition de fouille au mauvais endroit. Il faut tenter sa chance sur une autre petite église !
- "Non, je plaisante ! Je sais bien que ce n’est pas la bonne ! Nous allons fouiller dans celle de Low Town ! Qu’est ce que vous en pensez ?"
Il venait de faire mouche. A l’écoute de cette dernière hypothèse, le suspect avait légèrement haussé le coin gauche de sa lèvre supérieure. Ce faisant signifiait son mépris à l’égard du psychologue qui avait vu juste.
Une heure plus tard, la police mettait la main sur les explosifs déposés dans les sous-sols de l’église de Low Town. Les pratiques ecclésiastiques pouvaient de nouveaux accueillir en toute sécurité leurs fidèles. Halleluya !
Introduction aux micro expressions
Micro expression : Paul Ekman
Cette histoire n’est pas le fruit de mon abondante imagination mais restitue la première scène du premier épisode de la série “Lie to me”, sortie en 2009.
Les prémices de cette série s’appuient sur le concept de micro expressions qui peut être définie comme une expression faciale brève et involontaire qui traverse le visage humain. Elle dure généralement moins d’une demi-seconde et reflète les émotions réelles et immédiates d’une personne,à contrario aux expressions faciales plus longues que l’on utilise intentionnellement pour communiquer.
En d’autres termes, c’est un fugace aperçu de ce que quelqu’un ressent vraiment, même s’il essaie de cacher ses émotions.
Certains auteurs expliquent qu’une micro expression se produit lorsque l’ amygdale, un noyau situé dans la région antéro-interne du lobe temporal, répond de manière appropriée aux stimuli que l’individu ressent et que dans le même temps celui-ci souhaite dissimuler cette émotion spécifique. Cela conduit un individu à afficher très brièvement ses véritables émotions, suivi d’une fausse réaction émotionnelle.
Quels avantages tirer d’une micro expression ?
- Alors, les micro expressions seraient-elles la solution idéale pour connaître l’état émotionnel de nos contemporains ?
- La vérité s’inscrirait-elle sur nos visages ?
- Et comment identifier les expressions pertinentes parmi les milliers qui se manifestent sur nos visages ?
- Comment la science s’est-elle prononcée sur la crédibilité et la fiabilité des micro expressions ?
- A quoi ressemblerait votre quotidien si vous pouviez deviner les pensées des autres ?
Au cours de cet article nous tenterons de répondre à ces questions et je vous proposerai un exercice pratique afin que vous puissiez expérimenter par vous-même ce que pourrait vous apporter la détection des micro expressions.
Micro expression : les avantages
#1 | La peur |
---|---|
#2 | La colère |
#3 | La joie |
#4 | La tristesse |
#5 | Le dégoût |
#5 | Le mépris |
#5 | La surprise |
Paul Ekman : 7 micro expressions universelles
Paul Ekman et les micro expressions
Pour les spécialistes, la détection des micro expressions s’inscrit dans un large éventail de techniques dédiées à une analyse comportementale d’un individu que l’on souhaite étudier. Il s’agit de détecter comment se manifestent les émotions au travers trois grands canaux de communication ; à savoir les expressions faciales, le langage corporel et enfin le verbal et paraverbal. L’analyse comportementale nous renseigne donc sur l’état émotionnel de moment.
Le contexte étant posé, voyons plus précisément, ce que l’on peut définir comme étant une micro expression.
Chaque émotion s’accompagne naturellement d’une combinaison automatique, prédéterminée et spécifique de contractions musculaires corporelles et particulièrement au niveau du visage. A la seule lecture de ses brèves expressions faciales, il nous serait donc possible de déterminer quelles émotions en seraient l’origine. Seulement voilà, nos codes sociaux nous contraignent la plupart du temps à s’adonner à un jeu de dupe concernant nos émotions et, selon leur nature, leur manifestation peuvent retenir plus ou moins l’adhésion de nos contemporains. Je vous laisse imaginer les conséquences sociales si nous exprimions sans aucun filtre toutes les émotions qui nous traversent au quotidien !
Il s’agit donc de pouvoir s’armer d’une certaine réserve. Avec un peu d’entraînement et une conscience de nos propres processus cognitifs, ce que l’on appelle la métacognition, il serait possible de pouvoir contrôler une grande partie de ces expressions faciales. Si cette tromperie sociale est la plupart du temps un signe de maturité, elle a le malheureux désavantage de brouiller la lecture des émotions d’autrui et de s’exposer à des interprétations erronées de ses intentions.
Alors, que faire pour sonder les sentiments de nos interlocuteurs ? Et bien, malgré une forte tentative de régulation volontaire de nos expressions, il subsisterait comme des réminiscences furtives de ces manifestations émotionnelles dissimulées et qui révéleraient la véritable émotion ressentie. Derrière un sourire de façade, il se peut que soit dissimulée une colère bien réelle et qui pourrait être dérobée lors d’un rapide froncement de sourcils de moins d’une ½ seconde. C’est sur ses instants fugaces que ce sont portés les travaux de recherche du psychologue Paul Ekman et qu’il désigna sous le terme de micro expressions.
A l’issue de ses recherches, et sur le postulat que nous sommes prioritairement des êtres émotionnels plutôt que rationnels, Paul Ekman mis en avant 7 micro expressions universelles qui, selon lui, ne seraient pas le fruit d’un apprentissage mais bien d’un héritage inné que l’on retrouve partout autour du globe, et ce, qu’elle que soit la culture.
Il attribue à ses furtifs mouvements faciaux les expressions émotionnelles de la peur, la colère, la joie, la tristesse, le dégoût, le mépris et enfin la surprise.
Il suffirait donc de capturer ces moments éphémères et d’en améliorer notre lecture afin que nos interlocuteurs n’aient quasiment plus de secret pour nous. C’est en partie possible mais pas aussi simple qu’il n’y paraît. En réalité, les micro expressions peuvent aussi bien intervenir dans un contexte émotionnel dissimulé comme non-dissimulé. Dès lors l’assurance d’une bonne lecture émotionnelle ne pourra reposer que sur cet unique critère au risque de s’exposer à des dérives évidentes. Nous verrons plus en aval ce que ces dernières peuvent impliquer.
Ce qui fait qui fait des micro expressions un sujet intéressant, c’est qu’à l’opposé des expressions faciales classiques, il serait très difficile, voire impossible, de masquer les manifestations de micro expressions.
Pour autant, nous avons vu que les micro expressions ne se limitent pas à des réactions émotionnelles sur lesquelles nous n’avons pas de contrôle. Certaines peuvent être intentionnelles tandis que d’autres sont involontaires, et par conséquent, certaines sont authentiques tandis que d’autres sont fausses ou trompeuses. L’expression faciale peut être délibérée ou spontanée.
D’ailleurs, certains individus possèdent naturellement la capacité de maîtriser leurs expressions. nous pouvons inclure dans cette catégorie les menteurs pathologiques, tandis que d’autres vont devoir acquérir cette compétence, comme par exemple les acteurs.
Les "menteurs innés" peuvent être conscients de leur aptitude à contrôler les micro expressions, de même que ceux qui sont bien imprégnés de cette pratique car ayant depuis toujours eu recours à ce stratagème en pure duperie. Ces personnes peuvent simuler des émotions en affichant une expression qui ne correspond pas à ce qu’elles ressentent réellement. Par exemple, quelqu’un pourrait exprimer de la peur alors qu’en réalité il n’en ressent aucune.
Les expressions faciales peuvent être dissimulées pour diverses raisons, comme par exemple pour des motifs culturels ou des normes sociales. Il n’est d’ailleurs pas rare que de nombreux garçons soient élevés avec une règle culturelle très répandue selon laquelle "les hommes ne pleurent pas et ne montrent pas de peur".
Il existe également des règles plus personnelles qui ne sont pas nécessairement partagées par la majorité de la société mais qui peuvent être le produit de spécificités familiales ou de choix individuels. Un enfant peut apprendre à ne jamais regarder son père avec colère, ou à ne jamais afficher de tristesse lorsqu’il est déçu. Ces normes comportementales, qu’elles soient partagées par la culture ou être propres à l’individu, sont souvent intériorisées si tôt et si profondément qu’elles régissent automatiquement les expressions faciales, sans réflexion consciente.
Exemple pratique de l’usage de micro expressions
Passons maintenant à la pratique. Dans la simulation qui suit nous allons nous entraîner à deviner les émotions en s’appuyant sur une lecture des micro expressions. Celles-ci seront reconnaissables par l’activation au niveau du visage de ce que l’on appelera des muscles fiables et qui se manifesteront par une action motrice précise et que découvrirons au fil des étapes. Etes-vous prêt ?
Je vous propose maintenant de vous mettre à la place d’un recruteur dans un service de ressources humaines dans une entreprise de taille moyenne. Vous êtes dans une salle de réunion classique avec un candidat que vous avez reçu quelques minutes plus tôt. Les échanges de bienvenue passés, vous avez sollicité le postulant, à l’offre d’un poste de commercial, afin qu’il présente ses atouts et expériences professionnelles. A cet instant, vous êtes à l’écoute de toutes les informations que ce prétendant va vous offrir. Dès lors, pourquoi ne pas essayer de porter une attention particulière sur ses micro expressions ? Ce que nous en interpréterons et ferons par la suite n’a pas d’importance à cette étape. Vous allez uniquement porter votre attention à détecter ses mouvements si fugaces. C’est parti !
L’attitude générale du candidat est dynamique et il égraine les expériences à succès qu’il a eu l’occasion de rencontrer dans son passé professionnel. A son écoute, votre acquiescement et votre mine conquise est parfaitement perçue par le candidat que ne peut réfréner son sentiment de joie face à votre attitude, selon lui, porteuse d’espoir. Vous détecter alors un léger sourir. Très légèrement, les coins de sa bouche se sont relevés en même temps que de petites pattes d’oie soient apparues sur l’extérieur de ses yeux lorsque les joues se sont remontées. Ça n’a duré qu’un bref instant mais vous avez bien détecté un sourire sur son visage.
Micro expression : exemple pratique
Vous prenez tout à coup le choix de d’arrêter son monologue en lui posant une question qui sembla le surprendre. Une insignifiante ouverture de bouche fût associée à une élévation de ses sourcils et de ses paupières offrant une plus large ouverture de ses yeux. S’il fût, de prime abord, surpris par votre question, il y répondit pourtant promptement avec toute la superbe qu’il laissait paraître depuis le début de votre rencontre.
Malgré tout, sa réponse n’apporte toujours pas les éléments pour vous satisfaire et vous insistez. Cette fois-ci sa bouche délivre un bref sourire mais à la différence prêt qu’un seul des côtés de sa bouche s’est mis en mouvement. Est-ce un signe de mépris ? Vous y répondez comme tel en évoquant l’enjeu du poste par rapport à cette question en particulier. Vous détecter alors une micro expression de peur qui se manifeste par une élévation rapprochée des sourcils alors que ses paupières inférieures se tendent et qu’opère un mouvement d’étirement horizontal de sa bouche. Une manifestation semblable à celle que vous aviez remarquée la veille au soir sur le visage de l’un de votre propre pendant qu’il regardait un palpitant thriller sur votre poste de télévision.
Vos échanges continuèrent jusqu’aux termes de l’entretien que vous concluez en évoquant des sujets plus triviaux comme les problèmes récurrents de plomberie qui touchent vos locaux depuis quelques semaines. Toujours accaparé à l’observation des micro expressions du candidat, vous remarquez un bref plissement du nez attaché à une élévation de la lèvre supérieure. Les problèmes de tuyauterie abordés auraient-ils par surprise entraîné un sentiment de dégoût de la part de votre destinataire ?
Enfin, vous raccompagnez chaleureusement celui-ci vers la porte d’entrée. L’entretien s’est déroulé cordialement et sur les quelques derniers mètres vous l’informez que son profil vous intéresse mais que d’autres candidats présentent également des avantages intéressants pour le poste. A cet instant, le candidat prend toute la mesure qu’il se trouve être en concurrence directe avec d’autres et ne peut réprimer furtivement une expression de colère. Les sourcils baissent et se rapprochent pendant que les lèvres se rétrécissent et que les paupières inférieures se relèvent comme pour parer une lumière trop aveuglante.
Puis il s’éloigne. Durant tout l’entretien, vous avez pu identifier tous ces signaux quasi imperceptibles et il vous reste maintenant la lourde responsabilité de les interpréter parmi les multiples autres informations captées durant l’échange. L’enjeu est de taille car il ne repose sur aucune vérité ni aucune science exacte. Le recrutement est de toutes façons toujours un pari.
Micro expression : Mise en garde
Micro expression : Mise en garde
Ce petit jeu de mise en situation nous montre que la détection des micro expressions n’est en rien suffisante pour qualifier les intentions d’autrui. Autant que faire se peut, nous devrions toujours garder beaucoup de réserve sur des recettes prêt à l’emploi.
Pour autant, pour la plupart d’entre nous, nous interprétons le langage du visage de manière intuitive sans pouvoir expliciter les signes que nous déchiffrons. Le recours à la lecture des micro expressions pourrait combler partiellement cette carence mais ne devrait pas constituer à elle seule l’unique base décisionnelle d’une action. Si le postulat scientifique stipule qu’un nombre de micro expressions associées à un état émotionnel précis est universel, cela ne signifie pas que nous détenons ici la clé et le décryptage des intentions de notre interlocuteur. Passer outre ce prérequis est donc intellectuellement impensable.
Je sous-entend ici les dérives potentielles de l’usage d’une telle méthode entre les mains de corps constitués ayant à leur portée ce qui est convenu d’appeler “la violence légitime”. Pire encore, Maria Hartwig, professeur de psychologie au John Jay College of Criminal Justice, affirme qu’à la suite de mauvaises lectures de micro expressions perçues, des interrogatoires plus engagés ont eu pour conséquence l’emprisonnement injustifié de suspects.
D’autres auteurs évoquent au contraire que les recours aux micro expressions aboutissent rarement à des arrestations lorsqu’ils sont mis en œuvre dans des endroits comme les aéroports. Un témoignage devant le Congrès américain a révélé que seulement 0,6 % des 61 000 passagers signalés aux forces de l’ordre en 2011 et 2012 ont abouti à une arrestation (US Government Accountability Office, 2013)”
Devrions-nous, malgré tout, craindre une généralisation de la détection des micro expressions potentialisée par les nouvelles technologies et de l’IA et nous exposant une régulation sociale coercitive ? Peut-être mais la théorie des micro expressions ne bénéficie pas, pour l’heure, de consensus scientifique.
Les détracteurs de Paul Ekman s’appuient notamment sur des études qui montrent que la théorie des micro expressions manque de cohérence interne dans sa formation conceptuelle. (https://journals.sagepub.com/doi/abs/10.1111/j.1467-9280.2008.02116.x)
Le caractère spontané et irrépressible des micro expressions est même parfois remis en question comme dans cet article paru en 2016 dans Nature qui explique qu’il est possible de masquer des expressions involontaires avec de fausses expressions et que dans des situations réelles, plus de 40 % du temps, nous ne pouvons pas faire la différence. (https://www.ncbi.nlm.nih.gov/pmc/articles/PMC4768101/)
De plus, des questions se posent quant à l’impact de nos propres présupposés sur les micro expressions. C’est ce que Judee K. Burgoon soutient en 2018 dans le journal Frontiers in Psychology et s’interroge sur le fait que la théorie des micro expressions présuppose que les gens ressentent des émotions détectables toujours liées aux mêmes pensées ou motivations. Mais que se passe-t-il si, par exemple, les gens se sentent heureux plutôt que coupables d’avoir trompé les autres ? (https://www.researchgate.net/publication/327774358_Microexpressions_Are_Not_the_Best_Way_to_Catch_a_Liar)
Burgoon cite également des études montrant que les micro expressions sont finalement exceptionnelles. Dans l’une des rares enquêtes sur la fréquence des micro expressions, Porter et Ten Brinke (2008) ont codé 700 expressions émotionnelles authentiques et falsifiées à enjeux élevés et ont découvert que seulement 2 % étaient des microexpressions.
Une fois encore, la mesure est de mise et aucune certitude pratique ne peut être avancée.
Pour autant, le recours aux micro expressions n’est qu’un outil parmi beaucoup d’autres que nous devrions pondérer et mettre en perspective d’un contexte en mouvement perpétuel. Gardons-nous que l’analyse des micro expressions ne nous enferme dans une compréhension simpliste de l’autre en ce sens où celles-ci ne peuvent décrire, à elles-seules, l’alpha et de l’oméga du mensonge et de la vérité. Paul Ekman, lui-même, insiste sur le fait qu’il n’existe aucun geste précis qui caractériserait le mensonge. De plus, s’interroger sur la présence ou non d’un mensonge est-elle davantage plus importante que ce qu’il le motive ?
Etant en permanence assujetti à notre contexte, il serait bien osé d’imaginer que nos expressions corporelles en soient totalement détachées.
Dès lors, nous préférerons cheminer dans l’échange ce qui nous offrira la possibilité d’observer comment les émotions s’expriment en fonction des différents canaux.
C’est dans la récolte d’un maximum de détails congruents (enjeu, ligne de base qui est notre fonctionnement usuel, points de fracture, …) que nous pouvons nous construire une opinion. Malgré cette accumulation à notre portée, il serait plus prudent de considérer une interprétation pour ce qu’elle est et non être considérée comme le reflet du réel.
Micro expression : Pour quelle utilité ?
En faisant preuve d’humilité et appliquant des mesures de prudences quant à nos propres interprétations, la détection des micro expressions dans un plus large cadre d’analyse comportementale peut nous aider à améliorer la qualité de nos échanges. Que vous soyez thérapeute, manager, commercial, coach ou simplement une personne soucieuse de maintenir un bon alignement conversationnel avec votre interlocuteur, savoir détecter les micro expressions sera une compétence à ne pas négliger. Par exemple, si vous repérez une émotion de peur vous pourrez selon votre choix réorienter votre échange afin de ne pas risquer de rupture de communication ou de confiance, qui est le plus souvent crucial. Les commerciaux et thérapeutes ne me contrediront certainement pas !
Si vous souhaitez développer vos aptitudes à détecter les micro expressions, je vous ai préparé un petit aide mémoire gratuit en libre téléchargement. Pour ce faire, je vous invite à vous rendre sur "Guide gratuit de détection des micro expressions" pour avoir accès au lien de téléchargement.
Micro expression : faciliter les échanges
Conclusion
Notre chapitre sur les micro expressions se termine ! Si voulez en savoir davantage sur les techniques de psychologie appliquée et plus largement le site web dédié à la Préparation mentale et aux techniques de manipulation